Onglets

dimanche 18 décembre 2016

Baccalauréat, le film de Cristian Mungiu

C’est pas la joie !


Voilà sans doute l’impression dominante après les 2h10 de projection. Pas la joie d’avoir fréquenté des familles où domine une telle déprime, d’avoir voyagé dans une Roumanie à ce point corrompue, d’être resté longtemps prisonnier d’un parcours aussi trouble que monocorde. 
La question est : pour pointer les compromissions et les trafics d’influence qui règnent semble-t-il en maîtres dans le pays, faut-il les multiplier à l’écran au point d’étouffer le spectateur ? Faut-il, pour montrer l’abattement d’un pays, choisir un tel ton morose et des plans-séquences si épais ?... C’est l’excès de larmes qui peut affecter un propos tragique jusqu’à en faire un mélo trop appuyé. Et le style de Cristian Mungiu qui signe ce «Baccalauréat » ne donne pas dans la sobriété mélancolique.

Un synopsis intéressant


Dommage, car la trame est intéressante. Comment, de modestes arrangements en

dimanche 11 décembre 2016

L’expo « Soulèvements » au Jeu de Paume. L’esthétique des images mène-t-elle à la lucidité historique ?…

Un expo multi-supports
Emeute - Gravure de Käthe Köllwitz

Révoltes, émeutes, agitations, manifestations… constituent le thème abordé jusqu’au 15 janvier au Jeu de Paume. Est exposée une sélection d'œuvres de toute nature : peintures, films, affiches, documents, nombreuses photos… Une importante rétrospective qui occupe la totalité des salles. On peut se souvenir qu’en 1789 au Jeu de Paume de Versailles les députés des trois ordres s’étaient soulevés et avaient fait le serment d’écrire une nouvelle constitution.


Soulèvements pris au pied de la lettre

L’exposition est intitulée Soulèvements, choisis parmi ceux de l’histoire revendicative des siècles derniers. C’est sans doute l’idée la plus intéressante de l’expo que de prendre ce titre au mot, en abordant ces révoltes par les gestes d’élévation qu’elles suscitent. Images de lever de drapeau ou de dressage de banderoles, de jet de pavés, tir de balles, escalade des forteresses, poings brandis, déploiement des corps… 
G.Caron -Manif. anticatholiques                    D.Adams - Patriot            A. Korda - El Quijote de la Farola       

Soulèvements pris au pied de la lettre donc. Cela illustre bien l’envol des idéaux défendus par les insurrections. La révolte s’affiche en tant que mouvement, geste, dynamique, elle

dimanche 4 décembre 2016

Histoires de temps

Le battement du tambour


Tourne la roue du devenir continu des causes et des effets. 

Shiva rythme le temps par le battement du tambour qu'il tient dans sa main. 

Le soleil culmine et décline aux instants des deux solstices.

Les ailes des dragons battent la volatilité de l'instant et leur longue queue s'enroule en spirale comme le temps éternel.

Tourne la roue du devenir bouclé des causes et des effets. 

L'écoulement ininterrompu du samsâra ; le principe spirituel éternel de tout être, qui voyage d'une forme à une autre.
Achille marche 10 mètres derrière une tortue. Il la rattrape. Mais pendant qu’Achille franchit ces 10 mètres, la tortue avance d'un mètre ; puis le temps qu’Achille parcoure ce mètre, elle avance de 10 centimètres ; lorsqu’il brave ces 10 centimètres, la tortue a avancé d'un centimètre… etc !  La dépassera-t-il ?
Le blog de Claire Lomme

Retourner la flèche du temps ?


Le tic-tac régulier de Newton. La pierre qu'il lance dans la mare y forme des ondes jolies, régulières. Puis il change t en – t dans les équations des mouvements : on voit alors les ondes se rétracter vers l’impact, la pierre ressortir de l'eau pour revenir dans la main du savant, sèche.
 

Tourne et revient la roue du devenir inversé des causes et des effets. 

Permuter les effets et les causes ?... Retourner ainsi la flèche du temps ?... – Pas d'accord,

vendredi 2 décembre 2016

Sully - le film de Clint Eastwood : un amerrissage réussi

Happy end


Voilà un film à la fin heureuse… Je ne dévoile rien, le monde entier a célébré le sang-froid des pilotes qui ont tiré d’affaire 155 individus mal embarqués. C’est un déroulement convenant bien au cinéma américain, lui qui déteste tant montrer les revers et les déconfitures qui affecteraient la Nation. Souvenons-nous des dernières scènes de Titanic où les noyés réapparaissent miraculeusement vivants sur le pont du bateau.

Concernant Sully, l’amateur de film-catastrophe ne se consternera pas de connaître à l’avance le dénouement. Bien au contraire, cela fait partie des conventions du genre. Grâce à Steve McQueen la tour n’a été évidemment pas infernale jusqu’au bout, et les prisonniers du ventre du Poséidon ont bien sûr fini par trouver l’issue vitale. Happy end également pour les passagers du Commandant Sully, gloire à l’Amérique !

Où donc placer le suspens puisqu’on connaît la fin ?


Sully n’est pourtant pas juste le film-catastrophe qu’on pouvait craindre (ou espérer), même

samedi 26 novembre 2016

Le client - Film franco-iranien de Asghar Farhadi


Comment ne pas dévoiler l’intrigue ?

Il est difficile d’évoquer l’intérêt du film sans dévoiler tout ou partie du scénario, tant son intensité dramatique est signifiante. Ainsi, si vous l’avez déjà visionné, vous pourrez parcourir cette critique jusqu’à son point final. De même si ­vous êtes assuré de ne jamais le voir. Mais tous les autres ne devront pas dépasser la limite de ce texte indiquée par un STOP bien visible et catégorique.


Tout s’écroule


Le film s’ouvre sur une métaphore assez grossière : celle d’un immeuble qui s’écroule sous les coups de pelleteuses d’une modernité non assumée. C’est la première lézarde que Farhadi nous montre de la société iranienne d’aujourd’hui. En suivront bien d’autres, celles qui vont affecter la vie d’un jeune couple dans cette société fêlée parce que trop rigide. Un couple, elle Rana et lui Emad, pourtant ouvert, qui semble a priori sorti des pesanteurs traditionnelles. Mais elles sont bien présentes et un événement va révéler à quel point. Le film se déroule dès lors avec une inexorable intensité dramatique, oscillant entre thriller psychologique et film sociétal, démontrant séquence après séquence toute l’aliénation d’un corps féminin trop enfermé dans ses voiles et dans de vieux principes de domination masculine. Mais STOP, déroulons davantage le fil du sujet. Divulguons...

dimanche 20 novembre 2016

Mademoiselle : film sud-coréen de Park Chan-Wook *****/5

Revirements


Le film aurait pu s’intituler Revirements, tant ils sont multiples.


Revirements de situations d’abord, au point qu’une seconde partie vient intercéder sur des images de la première. Renversements inopinés entre classes sociales. Pirouettes amoureuses entre genres, qui ne sont plus dès lors ceux que l’on croyait. En plans serrés, beaux retournements de corps, de regards et de langues. Mais aussi basculements de langages entre japonais dominateur et coréen colonisé. Volte-face de personnalités. Revers de fortune. Permutations impromptues de poisons éphémères. Délicats faux semblants se retournant vers les pires perversions sadiques. Hyper-réalisme tournant au soudain baroque…

Un twist constant entre  manipulés et manipulateurs

Tout au long des trois parties du film, tout est twist impensable entre manipulés et

samedi 19 novembre 2016

Expo au Grand-Palais - Mexique 1900-1950, Diego Rivera, Frida Kahlo, Orozco et tant d’autres …

Comment l’art parvient à construire un récit national : voilà ce que montre l’expo Mexique 1900-1950 au Grand Palais.

Quelle conscience nationale apaisée pouvait-on écrire sur une histoire aussi dramatique que celle du Mexique ? Quels mythes mettre en avant sur un fond ethnique et social si éclaté ? L’Histoire a la mémoire longue et le for intérieur du pays n’a jamais oublié les civilisations indiennes conquises par l’Espagne en 1521. Olmèques, Toltèques, Zapotèques, Mayas, Aztèques vivent encore. On les revoit dans les vieilles pierres de Palenque ou de Teotihuacan, dans les figures de jade et d’obsidienne, sur les motifs des textiles et des fresques murales. Et le métissage n’a pas dissout la présence indienne, encore bien visible, aussi bien dans les villages reculés en montagne que sur les modernes avenues du Mexique d’aujourd’hui.

Alors comment forger un mythe national sur un fond si disloqué ?


Comment, au début du XXème, intégrer 300 ans de colonisation espagnole, une guerre d'indépendance, puis un demi-siècle d'instabilités politique et sociale, plusieurs guerres opposant le pays en gestation aux États-Unis, à la France, à lui-même ? Comment assembler ces terribles éclats pour reconstruire un sens commun ?

Parcourant les salles du Grand-Palais, sous nos yeux la réponse est exposée : d’une toile à l’autre, d’un film à une sculpture, se réécrit le grand roman fondateur de la Nation mexicaine.



Diego Rivera – La Molendera

Scène traditionnelle d’une femme en train d’étendre des tortillas sur une pierre volcanique, le metate.


Le maïs est l’aliment de base et constitue

mardi 15 novembre 2016

Le pataouète et les accents de la Méditerranée

Ce pataouète, fatras de tous les accents de la Méditerranée, doit être lâché sans articuler, en mâchant les consonnes avec des cacahuètes, en les gâchant d’un flou épais et brouillon, en ouvrant démesurément les voyelles, comme si les mots n’avaient d’importance que par leur barouf fanfaron, leur sens ne comptant guère. Y’a des tas de consonnes qu’elles seraient trop fatigues à prononcer : comme les L, les G, les V…
Oilà, ça veut dire voilà. Réar, ça veut dire regarde, et pour articuler capable sans passer la journée dessus, on dira capab’. De toute façon, une bonne tape dans le dos, ça suffit pour dire au copain qu’on l’aime bien, qu’on est simplement heureux avec les olives, les anchois, un verre d’anisette Limiñana et une poignée de bliblis...

Penser ?

 Et oilà ! Ici à Bab el-Oued, notre vie quotidienne se passe de vocabulaire précieux. Penser? Penser à quoi?... On croit vaguement en un Dieu vaporeux et barbu, sorte de papé installé sur son nuage à regarder passer les gens. Le rôle attribué à son bon Fils – celui qui croise les bras au dessus des lits matrimoniaux, le petit Jésus – est surtout de protéger la santé de la famille. Malgré qu’il est maigre comme un

dimanche 6 novembre 2016

L’expo Hergé au Grand Palais : le monde de Tintin


Panoramique d'une grande fresque couvrant toute une salle de l'expo

Voyages

Est-t-il possible de voyager de Shanghai à Caracas, de Syldavie au Congo colonial, du désert d’Arabie aux neiges du Tibet, jusque sur la Lune, le tout sans quitter Bruxelles ? Oui, c’est tout à fait faisable ! Il suffit de lire les albums de Tintin, de les relire, ou encore de passer quelques heures au château de Moulinsart, pardon, au Grand Palais.
Trois conditions requises pour ce dernier choix : avoir de 7 à 77 ans (à moins de s’appeler Michel Serres qui affirme avoir une dispense), être un tant soit beaucoup tintinophile (sans toutefois forcément aller, comme Pascal Bruckner, jusqu’à connaître les immatriculations des navires et des voitures), se transporter à Paris-Concorde (une broutille pour qui veut prendre pour modèle notre globe-trotter) et s’acquitter de la somme peu modeste de 14 €. Mais enfin, 14 € pour franchir tant de kilomètres en hydravion, train d’altitude, cargo esclavagiste ou fusée intersidérale, ce n’est pas le Pérou.

À la rencontre de fameux personnages


Parcourant les dix salles de l’expo, on tombe sur une kyrielle de célébrités mondiales.

Tintin d’abord, le justicier puceau (M.Serres), l’enfant de la bulle (M.Daubert) , le fils Courage sans parentèle, l’ado rien du tout (ce que signifie tintin) qui pourtant peut remuer le monde.

Milou, le fox-terrier arachnophobe, fan de whisky, amateur d’os. N’ayant qu’une gueule unique (pardon, qu’une bouche, puisqu’il est doté de parole), il est arrivé que l’héroïque Milou délaisse un beau spécimen à moelle pour pouvoir rapporter le spectre du roi Muskar XII. Il semblerait qu’à ce jour, Milou soit le seul chien promu Chevalier dans l’ordre du Pélican d’Or syldave.


Le capitaine Haddock, Archibald de son prénom, mille sabords, toujours entre deux

mercredi 2 novembre 2016

Ceci est une exposition : Magritte au Centre Pompidou

Trahison des images


Comme l’affirme sans risque la brochure de l’expo, les représentations du monde que le peintre nous donne sont trompeuses, énigmatiques. Magritte l’a bien dit : « Je veille, dans la mesure du possible, à ne faire que des peintures qui suscitent le mystère… ». Décalage entre l’objet et sa représentation, Trahison des images en effet. 

Magritte : « Qui pourrait fumer la pipe de mon tableau ? Personne. Alors ce n'est pas une pipe. »

Adepte du comique de répétition, Magritte a intitulé une de ses dernières œuvres « Ceci n'est toujours pas une pipe ».

Magritte : un incorrigible plaisantin ? Comment vas-tu…yau de poêle ?

Ambiguïté, burlesque, dérision… En un mot, humour.

J’ai entendu à l’expo le rire jovial d’un enfant en contemplation devant l’improbable locomotive de « La durée poignardée ». Le non-sens de cette fumante sortie du tunnel dans un salon bourgeois bien ordonné sonne comme un énorme gag, et m’a fait penser à

dimanche 30 octobre 2016

Celui-ci n’est pas Einstein : les grands photographes revisités

Entre l’article sur Magritte « Ceci n’est pas une pipe » posté récemment, et la publication d’aujourd’hui « Celui-ci n’est pas Einstein », ce blog s’intéresse décidément aux faux semblants.
  Ce n’est pas tout à fait Einstein sur ce portrait étrange, en effet…. S’agirait-il d’un Face-Swap ? ce mix de deux visages que savent si bien faire les smartphones et dont j’avais parlé dans ces pages.

Deux visages… Certes celui d’Einstein tirant la langue au photographe Arthur Sasse, mais à bien y regarder, les plus physionomistes reconnaîtront aussi un acteur célèbre, très célèbre… Lequel ?

jeudi 27 octobre 2016

Les petits arrangements au foot, et dans la vraie vie…

Le coup tordu sur le genou du n° 7

Nous sommes à la 7ème minute de la finale de la Coupe d’Europe 2016.
Un bon coup dans le genou du meilleur joueur adverse, de celui qu’il fallait dégommer… Volontaire ou pas ? Ou juste un peu exprès ? Un élan sans doute plus appuyé de Dimitri Payet ? Parce qu’il va buter sur le génial Ronaldo, le marqueur redouté. Celui qui pourrait bien barrer l’entrée du paradis à son équipe, celle de France, sauf si Ronaldo rejoint en boitant le banc de touche…
Le tweet de la mère de Ronaldo :"le jeu, c'est de shooter dans le ballon, pas de blesser un adversaire"

Les coups tordus historiques

Au foot (comme en politique) on ne compte plus les

samedi 22 octobre 2016

Auriez-vous aujourd’hui votre Certificat d’Études Primaires ?... À vos crayons…

Le certif, une grande épreuve initiatique


Pendant plus d’un siècle, depuis 1866 jusqu’en 1989,
des générations d’écoliers ont passé le Certificat d’Études Primaires. Beaucoup d’entre eux quittaient alors l’école pour leur première embauche. Le certif était la grande épreuve initiatique de l’époque 

Intéressant de jeter un coup d’œil à certaines épreuves. Certaines (la plupart) laissent pantois tant elles n’étaient pas faciles, s’adressant à des gamins de 13 ans. Particulièrement celles d’orthographe, d’analyse de la phrase et de calcul. Difficulté d’autant plus étonnante que les meilleurs élèves, eux, étaient sélectionnés dès 11 ans pour partir vers la voie royale de la 6ème au lycée, et dédaignaient de passer le certif.

Loin derrière nous, la France rurale

Frappant aussi de constater dans la teneur des énoncés à quel point la société française a muté. Il y est

dimanche 16 octobre 2016

Le tohu-bohu des nuages

Il était une fois une tortue volante répondant au nom de Matamata. 

Un homme peut facilement tenir sur sa carapace, voguer dans les airs avec elle pour monture. D’autant que Mata adore voyager, aussi bien sur notre Terre que dans les temps passés.

C’est Matamata qui a insisté pour que je l’accompagne à de telles altitudes, et je perçois maintenant ses raisons.

Un bonhomme de brouillard


Posé sur l'horizon, un soleil géant se lève et nous escorte, nous baigne de sa lumière orangée. Au-dessous, le paysage se transforme, se capitonne d'épais nuages moelleux. Insensiblement, les meringues argentées se déforment, fluctuent, moutonnent. Un gros

vendredi 7 octobre 2016

Quelle sera la cause de notre dernier soupir ?

Les déclencheurs des maladies


Plutôt que de juste lister les pathologies qui veulent nous trucider, le média-web notre-planete.info a eu l’excellente idée de classifier les déclencheurs possibles de ces atteintes à notre bonne santé. Un travail forcément très approximatif : à quoi est dû l’infarctus fatal d’un obèse fumeur mangeur de viande habitant près du périph dont le père était malade du cœur ? Les cinq mon capitaine ! Au moins… 

Toutefois, même à prendre avec de grosses pincettes, les chiffres publiés par le site sont issus des statistiques de l’OMS et on peut sans doute leur attribuer assez de confiance. Voici un petit résumé des menaces les plus saisissantes.

Les attaques de requin

Étonnamment, on peut se baigner tranquille dans tous les océans. Même si on est une demoiselle en règles, ou un gros homme appétissant. Les mortelles attaques recensées en 2014 sont au nombre de 5, oui cinq : une goutte d’eau

dimanche 2 octobre 2016

Aquarius, le film

Brésil : ville côtière de Recife

Aquarius, c’est le nom d’un élégant immeuble années 40, juste en regard de l’immense plage. Un immeuble en sursis. Au premier étage, un bel appartement ouvert sur le large. Un hamac douillet se balance dans l’air de la terrasse. Aux murs, se pressent des livres et des disques vinyles, par milliers. Sur les étagères, des albums photo, quelques bouteilles de bon vin, des bibelots.

Clara

Bien installée dans le hamac, il y a Clara. Clara vit bien sa solitude ici. Les années ne semblent pas lui peser. Sa vie a été si dense, avec la musique pour compagne, entre pop et bossa, qui au passage irradient notre film. Et Clara est si belle. On n’ose à

samedi 1 octobre 2016

Platon, Magellan, Vivian Maier et les ombres…

Lors d’une réunion de l’excellent club-photo Révélateur (Boulogne-Billancourt), des photos portant sur le thème « Des chiffres et des lettres » furent exposées. Chacun avait eu tout loisir d’observer chaque cliché puisque le but de la réunion était de choisir nos images préférées. Parmi les photos, se trouvait celle-ci :

  

Ah ah ah… Ha ha ha…


Image paradoxale pour certains, sans étrangeté aucune pour la majorité des participants. En effet, après un rapide sondage, il s’est avéré que sur 15 personnes interrogées, 11

jeudi 29 septembre 2016

La Reine Isabel du Portugal, François Mitterrand et les autres


Premier cours de l’année à l’excellent Institut Camões. Répondant à une question concernant Isabel du Portugal, la professeure nous conte une légende à propos de cette Reine : la belle légende des roses.

La légende des roses


Près de Coimbra, à la fin de XIIIème siècle, Isabel d’Aragon épousa le roi-poète Denis Ier. La Reine, très charitable envers les pauvres de la région, avait coutume, en cachette de son royal époux, de dépenser sans compter le trésor royal pour leur venir en aide. Dénoncée par un nobliau sans grande noblesse, le Roi, soucieux des deniers du Royaume, lui interdit ses pratiques altruistes, mais si dispendieuses. Cependant le cœur l’emporta et Isabel continua à faire l’aumône de toutes parts : à l’église, aux couvents, aux malades, aux nécessiteux... Elle dut juste emporter ses offrandes en les dissimulant bien sous le manteau. Devant la fonte du Trésor, le Roi se douta de la désobéissance de son épouse, et un matin, il interrogea la Reine sur son giron bien replet. La Reine dit qu’elle

dimanche 25 septembre 2016

Souvenirs d’un exode

Printemps 62, il nous faut plier bagages, fissa

Hier lundi 4 mars, Papa et Maman ne sont pas allés au travail, et ils m’ont laissé dormir jusqu’à 10 heures. Parce que 120 bombes qui explosent dans la ville pendant la nuit, ça favorise pas un bon sommeil. Cent vingt stroungas, comme on disait alors pour rigoler un peu et désamorcer la charge émotive.

Hier, on est tous restés barricadés à la maison et Papa en a profité pour me parler, pour me dire leur décision, que nous devons quitter l’Algérie. Parce qu’il n’y a plus d’espoir. Parce que l’avenir est ailleurs. Parce qu'on est roulés par une vague de l'Histoire. Parce que maintenant ils ont peur pour moi quand je vais à l’école. Alors je leur demande s’ils ont peur pour eux aussi, si c’est dangereux de prendre leur tram, ils détournent la tête. Pareil quand je leur demande si on reviendra à Alger. J’aurais pas dû poser cette question parce que maintenant Maman, la tête toute

lundi 19 septembre 2016

Divines ou Bâtardes ?

Divines ou Bâtardes, le titre a été choisi très tard, juste avant Cannes.
C’est dire la schizophrénie du film.
Dounia et Maimouna
Longtemps, il nous montre son héroïne Dounia marquée par ses pauvres et dures origines sociales. C’est une fille si pleine de vie, de rêves et « de clitoris » que tout pourrait lui être excusé : son inextinguible désir d’argent, sa violence, ses vilains trafics, ses mensonges et ses vols, ses fantasmes limités à Ferrari et à Reebok. Même si c’est difficile à faire au cinéma, se conformant à l’invitation de la réalisatrice Houda Benyamina, on ferme les yeux, affectueusement : c’est la société libérale la grande responsable. Nique sa mère et les

vendredi 16 septembre 2016

The Beatles, eight days a week , le film

Quatre garçons dans le vent

Certes ils l’étaient dès le début des années 60. Le vent de la célébrité qui a commencé léger dans les caves de Liverpool jusqu’à devenir l’insupportable ouragan qui les a défait. C’est cette histoire que raconte le film. Et il captive le film : extraits de concerts mythiques, séquences inédites de travail en studio, évocation de l’alchimie magique de leur amitié, images de leur espièglerie, gros plans de la démente hystérie de hordes de filles amoureuses… le tout ponctué de commentaires actuels et de confidences de Paul et Ringo.

Eight days a week

Plans après plans, le film nous fait réaliser à quel point leur groupe était exceptionnel. Leur succès n’a certes rien dû au hasard ! Avec ce génie musical qui permet à John et Paul de composer, écrire et mettre en boîte en deux ou trois heures des tubes que la terre

mardi 13 septembre 2016

Dans un futur proche, les robots ne sauront toujours rien faire, sauf la causette

Si on regarde bien, ces robots impotents qui néanmoins savent faire la causette existent déjà.
En s’adressant à son smartphone ou son ordi, quiconque peut dès à présent poser de vive voix toute question qui lui tient à cœur.

Dis-moi, robot : où en est l'affaire Alstom ?

Tenez, voilà un lien tout bête permettant d’en faire l’expérience sur ordi : https://www.google.fr/  . Avec un smartphone installez d'abord l'appli Google .
La page chargée, cliquez sur le petit micro présent sur la barre de recherche, puis

dimanche 11 septembre 2016

Frantz

Au cinéma, la qualité du silence traduit souvent la valeur du film. Dans la grande salle
obscure où j’étais, nous retenions notre respiration tant le film a du souffle. La grande Histoire et les insoupçonnables drames qu’elle peut engendrer sont dépeints avec tant de sensibilité, de finesse. Images « dé-peintes » en effet par le renoncement rapide à la couleur pour un superbe et signifiant noir et blanc : le noir des deuils de la guerre, le blanc des années du sursis avant l’inéluctable seconde guerre, nouvelle

vendredi 9 septembre 2016

Belles expos de rentrée à la Maison de la Photographie

Sept expos viennent d’ouvrir à la MEP.


Trois d’entre elles ne m’ont pas retenu longtemps :


    Martin d’Orgeval a tenté une mise à plat, mais n’est-ce pas le lot de toute image ?
Gotscho Remix habille ses clichés de véritables vêtements. Mais l’habit ne fait pas toujours le moine…

Anne Claverie a planté un grand végétal en plexiglas blanc, à l’envers, au milieu d’une salle noire : évocation sans doute d’un négatif exposé dans la chambre obscure.



Trois visites rapides donc, sans grande émotion ; cela laisse du temps et de la disponibilité pour les quatre autres :

  • Hélène Lucien et Marc Pallain ont bien réussi la difficile ambition de tout photographe : révéler l’invisible. C’est ici la sournoise présence des rayons gamma dans la vie de Fukushima après 2011. On les voit les radiations…
  • Superbes et dérangeantes images couleurs du cubain Paolo Titolo. Dans ses

mercredi 7 septembre 2016

Les aventures de Fernando Pessoa en BD…

Dans une brocante à Óbidos, je suis tombé sur une merveille : la vie de Fernando Pessoa en BD, un bel et grand album de 174 pages.
Superbes dessins sur papier glacé, texte riche mettant au défi un étudiant en portugais comme moi ! 
Après mes belles déambulations à Óbidos, j’ai flâné sur le Net à la recherche de l’album, et j’y ai déniché sa page FaceBook, des extraits en PDF, une multitude d’images reproduites, et même la possibilité de l’acquérir à la FNAC
Un beau cadeau de Noël pour les amoureux du poète !

samedi 3 septembre 2016

Albert Camus, l’absurde hasard qui s’est joué de lui, en janvier 1960, près de Sens…

Il était une fois une tortue volante répondant au nom de Matamata. Un homme peut facilement tenir sur sa carapace, voguer dans les airs avec elle pour monture. D’autant que Mata adore voyager, aussi bien sur notre Terre que dans les temps passés.

Là, elle plane vers le sud, au début des années 60. Elle aimerait rencontrer Albert Camus avant qu’il n’ait son terrible accident.



Matamata a franchi quelques automnes à rebours. 

Les champs d'oliviers, les falaises calcaires, les maisons de stuc roux, c’est déjà la Provence. Pour faciliter sa navigation, elle suit les routes. Nationales ou pas, les routes sont bombées, bordées de platanes, partagées en deux par des pointillés jaunes. Chaque

vendredi 2 septembre 2016

Tony Erdman - le film à voir

En Allemagne, de nos jours, une étrange famille…

Le père, d’aspect peu reluisant, sorte d’ours mal léché et rentre-dedans. La mère abattue et le chien à piquer (ou l’inverse). La fille, executive woman d’une multinationale, sans cesse en partance.

Le père un tantinet provocateur adore jouer avec son dentier postiche et avec les gens. La fille vit claustrée au moins à triple tour : dans l’obsession de ses négociations financières, dans la froideur psychorigide de sa solitude, dans une planète coupée des vrais gens...

D’ailleurs, vit-elle ?

C’est toute la question que veut lui poser son ours paternel. Pour cela, il va la poursuivre et

jeudi 1 septembre 2016

Marc Riboud ne nous a pas quittés !


Marc Riboud vient de mourir, mais grâce à ses images, il ne nous a pas quittés.

Sans doute un des photographes majeurs de la seconde moitié du XXème. Ses clichés expriment parfaitement l’esprit de l’agence Magnum : rigueur du témoignage, humanité, indépendance, qualité de la composition.

Une passion précoce pour la photo

Marc était pourtant considéré dans ses jeunes années par les Riboud comme le vilain petit canard de la famille (son frère Jean dirige la banque Schlumberger, son frère Antoine lance Danone) Marc, lui, à la sortie de Centrale Lyon, s’endort dans les usines, dessine des plans inadaptés. Ce n’est pourtant pas un dilettante, preuve par

mercredi 31 août 2016

La pompe à air, et les autres…

Adieu futurs rhumes, allergies, AVC et autres cancers ! grâce au purificateur "Intense Pure Air"


Depuis peu, me voilà l’heureux détenteur d’une nouvelle sorte de pompe : une pompe à air. Ne souriez pas, il s’agit d’un appareil ultramoderne et parfaitement sérieux. De marque Rowenta, il pompe
l’air ambiant, et le force à passer à travers quatre filtres. Le premier retient cheveux tombés, poussières avariées et poils de la pire nature. Le deuxième s’occupe des gaz (discrets ou odorants) et des méchants composés volatiles. Le troisième lui, avale fort aimablement les acariens, les moisissures, et il se délecte des virus et des particules

dimanche 28 août 2016

Hôtel Singapura

Unité de lieu : l’hôtel, chambre 27. (Le titre original est : In the room…)

Unité d’action : l’amour.

Le temps s’étale des années 50 à nos jours : passage par un beau noir et blanc, par un Technicolor saturé, par des images trash d’aujourd’hui. Inéluctablement, le temps coule et escorte la décrépitude de l’hôtel et des corps des divers personnages. Damien, lui, mort un nouvel an d’une overdose, est immuable : c’est un fantôme récurrent aux pouvoirs mirifiques présent dans toutes les scènes, posant son étrange regard sur les diverses péripéties sexo-sentimentales, et il donne au film l’unité de temps manquante. Damien apparaît ainsi

samedi 27 août 2016

Les terroristes s’habillent-ils en burkini ?

Dans mes billets postés sur ce blog récemment Nice 1 et Nice 2, je me souciais de la vague idéologique mondiale charriant xénophobie et obsession sécuritaire, et je décriais la petite cuisine des médias et des hommes politiques prompts à surfer dessus. Aujourd’hui, une nouvelle preuve par le burkini.

Quel burkini ? 

À Sisco, il n’y en avait pas l’ombre ! pas-de-burkini-sur-la-plage-de-sisco
Cette pseudo-affaire de Sisco a pourtant été le germe d’une rumeur nationale. Dans le contexte actuel, elle portait tous les ingrédients pour le devenir :
Burkini or not burkini ?

  • Le passé colonial de la France, particulièrement la guerre d’Algérie encore bien présente dans la mémoire collective, surtout dans le midi.
  • Un vieux racisme rampant envers les maghrébins.
  • Une défiance exacerbée envers

mercredi 17 août 2016

Une photo serait-elle toujours frustrante ?

Les yeux de la fille au chapeau rouge

M’est revenue en mémoire une récente soirée à l’excellent club-photo Révélateur de Boulogne-Billancourt. Un portrait d’un jeune modèle au chapeau rouge avait été commenté, et certains d’entre nous avaient regretté que le dit chapeau cache ses yeux, sans doute magnifiques : ils en étaient frustrés…

Toute photo serait-elle une privation ?

Une intuition me vint alors, me demandant si toute photo ne serait pas frustrante. Pire, si la frustration n’était pas l’essence même de la photo. Et cela tant pour l’auteur que pour le spectateur.
L’auteur n’est plus présent sur la scène où il a pressé le déclencheur. Cette scène qu’il a fixée est maintenant congédiée dans le passé. C’est donc une absence, la preuve du temps inexorablement fui, une nostalgie. Tout cliché est