obscure où j’étais, nous retenions notre respiration tant le film a du souffle. La grande Histoire et les insoupçonnables drames qu’elle peut engendrer sont dépeints avec tant de sensibilité, de finesse. Images « dé-peintes » en effet par le renoncement rapide à la couleur pour un superbe et signifiant noir et blanc : le noir des deuils de la guerre, le blanc des années du sursis avant l’inéluctable seconde guerre, nouvelle
tuerie que tout annonce dans le film.
Entre deux guerres
Entre deux guerres donc, entre deux pays, entre deux familles. Entre des couples. Pour les jeunes l’époque est impitoyable. Même pour les rescapés des tranchées, car les blessures sont intérieures, terribles, lourdes de conséquences. Ainsi la férocité militaire mène droit à la culpabilité, et la culpabilité ronge et engage au mensonge. Tout dans le film amène au mensonge : la compassion, la revanche, l’effroi, l’amour, le suicide, le pardon…
Pas un mélo
Certes non, le film n’est pas un mélo, tant les situations et les sentiments sont complexes, plongés dans l’Histoire, à cent lieues du grandiloquent et de l’outrance. Tout est dit dans un détail visuel, un plan rapide, un regard, en restant loin du discours asséné et lénifiant. Certains propos sont d’une force et d’une subtilité telles qu’on aurait envie de vite les réécouter pour les apprendre. Deux heures d’émotion et de jouissance intellectuelle, comme dans un grand roman. Là, le cinéma se hisse au niveau de la littérature. Ajoutons un beau jeu d’acteurs, une langue harmonieuse, des reconstitutions soignées sans trop en faire… Selon moi un chef-d’œuvre. Bande-annonce