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lundi 21 octobre 2019

L'écologie politique au chevet de la planète


Il ne se passe plus un jour, plus une heure sans que les médias ne nous alarment sur l'état futur de notre chère planète, et donc sur l'avenir de l'Homme. Le mot écologie revient sans cesse. En cherchant à en savoir un peu plus sur le sujet, il apparaît dans toute sa richesse. L'écologie touche à tant de domaines : à la science, aux techniques, à l'histoire, à la littérature, à l'économie, à la politique bien sûr. Mais aussi, du fait des abnégations qu'elle peut  réclamer à chaque individu, elle touche à notre propre éthique, au concept de liberté.
Les idées exprimées ci-dessous  proviennent de sources variées : parfois de simples copiés-collés d'extraits de Wikipedia, parfois des passages choisis d'articles de journaux, souvent des documents papiers ou numériques spécifiques au chapitre traité. Chaque source est indiquée dans le texte ou accessible par un lien.
Bien que volumineux, cet article n'est qu'une modeste tentative de synthèse et de mise en ordre des différentes idées qui gravitent autour de la notion d'écologie.


v Définition
a        L'écologisme est un ensemble de courants dont le point commun est de vouloir modifier l'organisation économique et/ou politique de manière à permettre un équilibre dans les relations humaines avec la nature (entretien avec Fabrice FLIPO dans Figaro Vox).
b        Étymologie : le terme écologie vient du grec oikos (« maison », « habitat ») et logos (« science », « connaissance »). Il fut imaginé en 1866 par le biologiste allemand Ernst Haeckel. 
¨      L’environnementalisme se concentre sur les conséquences sur la nature des activités humaines (pollution, risques sanitaires, déforestation, etc.)  et considère que des décisions ponctuelles permettront de les contenir (ex : interdiction du glyphosate, taxation des carburants…).
¨      L’écologie politique, elle, mène une critique systémique et réfléchit à des projets sociétaux globaux qui permettraient une transition durable, solidaire, démocratique vers une société respectueuse de la Terre et de ses habitants.
d        À distinguer de l'écologie scientifique
¨      La bio-écologie (ou bionomie) est la science qui étudie les êtres vivants dans leur milieu en tenant compte de leurs interactions, alors que l'écologie politique insiste sur la prise en compte de la préservation de la nature dans l'organisation sociale.

v Origines des préoccupations écologiques
a        La Bible
¨      « L’Eternel Dieu prit l’homme et le plaça dans le jardin d’Eden pour qu’il le cultive et le garde. »
¨      "Pendant six années, tu ensemenceras la terre, et tu en recueilleras le produit. Mais la septième, tu lui donneras du relâche et tu la laisseras en repos"
¨      La Bible écarte la vision d'une suprématie d’un Homme maître, souverain et propriétaire de la nature.
b        Jean-Jacques Rousseau
¨      J-J Rousseau fonde toute sa pensée sur la nature : origine, soutien et destin de toute vie et de toute activité humaine.
¨      Il plaide pour son respect, pour une réconciliation entre elle et l’homme, entre le cœur et la raison, les sens et le raisonnement.
¨      Il ne veut pas "retourner dans la forêt vivre avec les ours, mais il est conscient que sans la nature l’humanité dérive. Ayant perdu le goût pour les choses essentielles, le bonheur simple et vrai, elle dérape et finit par détruire tout ce qu’elle touche pour satisfaire des besoins artificiels."
¨     Il annonce la théorie de Gaïa qui considère l’ensemble de la biosphère comme un
seul être vivant : « Il n’y a pas un être dans l’univers qu’on ne puisse, à quelque égard, regarder comme le centre commun de tous les autres, autour duquel ils sont tous ordonnés, en sorte qu’ils sont tous réciproquement fins et moyens les uns relativement aux autres. »
¨      Déjà en 1750, il constate les immenses travaux de l’homme pour raser les montagnes, canaliser les fleuves, défricher les terres, assécher les marais...  Alors, il déplore «l’aveuglement de l’homme qui, pour nourrir son fol orgueil et je ne sais quelle admiration de lui-même, le fait courir avec ardeur après toutes les misères dont il est susceptible, et que la bienfaisante nature avait pris soin d’écarter de lui».
¨      Il précède l'idée de décroissance, en stipulant que le luxe, le superflu ou le gaspillage, est la source des maux de la société : « On croit m’embarrasser beaucoup en me demandant à quel point il faut borner le luxe. Mon sentiment est qu’il n’en faut point du tout. Tout est source de mal au-delà du nécessaire physique. »
c         Le Romantisme
¨      Le romantisme dénonce un certain désenchantement du monde, celui qui, selon M. Weber, fonde la modernité. Le romantisme serait au contraire un effort pour ré-enchanter le monde en prenant appui sur la nature. 
¨      Le romantisme refuse la quantification. Selon M. Weber, la modernité serait aussi cet esprit du calcul rationnel. Cela aboutirait à la destruction des valeurs qualitatives (beauté, harmonie, amour...) et notamment les qualités de la nature.
¨      Les romantiques critiquent la mécanisation du monde : le machinisme, la technique et le travail... Ils y opposent l’organique : ce qui est vivant.
d        Cultures amérindiennes
¨      De nombreux Amérindiens étaient et sont encore très attentifs à leur environnement, s’attachant à la durabilité plutôt qu’à un rendement maximum.
¨      Ils ont développé une éthique de la terre fondée sur une longue expérience et une vision cosmologique du monde avec ses  êtres animés et inanimés, naturels et surnaturels, organisés en un tout harmonieux dont ils font partie intégrante.
e        A partir du XIXème aux États-Unis, des figures tutélaires du courant écologiste diffusent peu à peu leurs idées
¨      Henry David Thoreau (1817-1862) est un philosophe, naturaliste et poète américain. Son œuvre majeure, Walden ou la Vie dans les bois, est une réflexion sur l'économie, la nature et la vie simple menée à l'écart de la société.
Ø  Elle publia Silent Spring (Printemps silencieux) en 1962, qui déclencha un renversement dans la politique américaine envers les biocides
Ø  Cela conduisit en 1972 à une interdiction du DDT et d'autres pesticides.
f          Théorie Gaïa (1979) : décrite comme une hypothèse (l'Hypothèse Gaïa) par James Lovelock, chimiste britannique, et Lynn Margulis, microbiologiste américaine. Elle fait référence à un ensemble d'hypothèses et de théories selon lesquelles :
    ¨      Les êtres vivants ont une influence sur la totalité de la planète sur laquelle ils se trouvent
    ¨      L'écosphère a développé une autorégulation : l'existence de chaque être vivant est alors supposée régulée au profit de l'ensemble de l'écosphère
    ¨      Le système autorégulé constitué par la totalité des êtres vivants (biomasse) et des constituants non vivants composant la masse totale de la Terre, et sans doute aussi le rayonnement solaire extérieur, possède des mécanismes internes pouvant le faire considérer comme un être vivant, conformément au paradigme cybernétique. 
  Celui-ci est nommé par convention Gaïa par allusion à la déesse mère grecque.

g        Culture allemande
¨      Imprégnée d'une esthétique paysagère spécifique, étroitement liée au Heimat, le pays natal.
¨      La protection de la nature y est engagée dès le début du XIXème. Consé-quence du romantisme, l’insistance sur l’esthétique paysagère prend une grande importance. 
¨      Cette  vision de la nature fut fortement instrumentalisée par le national-­socialisme. 
¨      L'idée défaitiste du « Waldsterben » (mort de la forêt) est apparue en Allemagne dès 1980, lorsque plusieurs auteurs ont affirmé qu'un déclin des forêts à grande échelle était en cours en Allemagne et dans d'autres pays d'Europe. « L’arbre qui meurt c’est ensuite l’homme qui disparaît ». Le débat sur le dépérissement des forêts devient la métaphore d’une catastrophe mondiale de l’environnement.
¨      Grünen allemands : un succès électoral et politique
Ø  L'instrumentalisation du Heimat, argument romantico-nationaliste qui avait prévalu jusqu'après la 2ème guerre mondiale, est discréditée.
Ø   A la place, c’est un discours lucide fondé  sur les sciences naturelles et la bionomie qui s’impose : il s’agit maintenant de prendre en compte les exigences d’une planification démocratique et de décisions d’aménagement équitables.


v L'écologie dans les courants politiques minoritaires
a        Extrêmes gauches trotskistes
  ¨      Dans les années postérieures aux événements de 1968, la préoccupation écologiste s’insinue difficilement dans ces groupes révolutionnaires.
  Ø  Pendant  les sept années et demi suivant 1968, l'hebdomadaire trotskiste Rouge n’a publié que treize articles consacrés àl’écologie, soit en moyenne un article tous les six mois. La principale raison de ce silence réside dans la certitude de l’imminence révolutionnaire.
     ¨      Plus tard, le programme trotskiste de 1977 finit par réserver une place à l'écologie.

       ¨      Mais, dans le même temps, l’organisation ne suit pas. Tout se passe comme si la Ligue communiste donnait des gages à l’air du temps en publiant épisodiquement des articles à tonalité écologiste, mais qu’en réalité elle méprisait ce type de revendications, trop éloignées de sa culture politique d’origine.
b        Anarchisme
¨      Théoricien du municipalisme libertaire, l'anarchiste libertaire Murray Bookchin envisage dès les années 80 une société affranchie du capitalisme et de l'État, une société formée par des communes libres et autonomes. Chaque individu exercerait le principe de démocratie directe. L'idée du municipalisme libertaire est de créer ainsi des institutions décentralisées et autogérées.
¨      Quant à participer aux actions écologistes, il faudra attendre 1977 : Le Monde libertaire appelle alors à se rendre à la manifestation contre la construction de la nouvelle centrale nucléaire à Creys-Malville
¨      Un certain nombre de militants optent pour les pratiques de désobéissance civile, invoquant le droit à violer la légalité au nom de la légitimité. Actions antipub, occupations de locaux industriels ou de zones entières, baptisées « zones à défendre » (ZAD) par leurs protagonistes. (Ex de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes).
¨      Le philosophe Pierre Madelin, enseignant à l’Université Ecosur au Mexique, reprend aujourd'hui les idées du municipalisme libertaire : la solution ne viendra pas de l'État ou de politiques redistributives, mais plutôt de l'auto-organisation de sociétés en marge, dont les initiatives se diffuseraient.
c         Marxistes-léninistes des années 60-90
d        Mouvements hippies
¨      Face à la complexité d'une solution globale, pour eux la solution est  locale, tribale, à travers un mode de vie simple et collectivisé épargnant la nature.
e        Succès actuel du wwoofing :
¨      Le but du wwoofing est de mettre en relation des personnes désireuses de découvrir un monde agricole respectueux de l’environnement. Il s’agit pour chacun de s’enrichir de rapports humains, et d’apprendre des techniques et des modes de vie incarnés par les hôtes. 
f          Communisme
¨      En RDA, l’industrie chimique, l’extraction du lignite et l’agriculture à grande échelle ont causé des dégâts bien connus à la nature. La réaction officielle des fonctionnaires de la RDA fut alors double. D’un côté, à partir des années soixante-dix, les demandes de protection de la nature ont été prises en considération. On a alors, dans une large mesure, protégé des espaces et des espèces. Par ailleurs, on présentait l’Ouest capitaliste détruisant et exploitant la nature alors qu’on tenait secrètes ou qu’on embellissait les données concernant le pays.
¨      Positions successives du PCF
Ø  Si la thématique écologique apparaît au sein de la gauche non encartée dans les années 1960, elle suscite au PCF nombre de réticences. Ainsi cette hostilité fut incarnée par Georges Marchais qui, dans les années 1970, voyait dans le thème de l’excès de croissance « un complot de la droite et de la social-démocratie européenne pour s’opposer aux revendications des travailleurs ».
Ø  Les militants du PCF reprochent aux militants de la décroissance de ne pas s'en prendre directement aux dirigeants du capitalisme et de culpabiliser les travailleurs en remettant en cause la notion même de pouvoir d'achat, que le PCF considère comme indépassable.
¨      Assemblant à la fois le socialisme et le marxisme avec la critique écologique, l'écosocialisme s'oppose radicalement au productivisme, au capitalisme, y compris le “capitalisme vert”.
¨      Les écosocialistes accusent le “capitalisme vert” (ou développement durable) d'être un habillage idéologique qui poursuit toujours la logique du marché et du profit.
¨      Se présentant comme un courant alternatif,dépassant le « socialisme réel» et le capitalisme, le mouvement écosocialiste propose la propriété collective des moyens de production, l’autogestion et la création de coopératives d'intérêt collectif.
h        La Deep Ecology
¨      Philosophie écologique qui prête à tous les êtres vivants la même valeur “intrinsèque”, indépendante de l’utilité que l'homme peut trouver. 
¨      L'écologie profonde confère alors des droits à la nature ( l'Écosphère) au même titre qu'aux êtres humains, rompant ainsi avec l'anthropocentrisme de l'idéal humaniste hérité des Lumières, d'où la notion de "crimes contre l'environnement" .
¨      Les deep ecologists rejettent les valeurs de la modernité (volonté technique et industrielle, idéologie du progrès par la raison).
i          Écologie morale
¨      L'enjeu est  celui d'une éthique de l'universalisme : qu'est-ce qu'un universel qui ne serait pas généralisable à  des milliards d'habitants?
¨      À production constante pour épargner la planète, tout  partage international juste des biens impliquerait une forte diminution des niveaux de vie des pays développés. Moralement il leur faut donc  l'accepter pour que les pays moins bien lotis puissent avoir un niveau de vie sinon égal, au moins plus décent.
¨      Certaines réactions occidentales de repli sur soi pourraient s'expliquer par le partage de la richesse actuellement en cours avec l'Asie.
¨      Les détracteurs d'une éthique basée sur l'idée d'épargner les générations futures argumentent qu'à terme, quoi qu'on fasse, le soleil est géologiquement voué à l'extinction. Alors...
j          Terrorisme d'extrême droite en 2019
¨      Patrick Crusius, le tueur d’El Paso, aux Etats-Unis, qui a fait 20 morts le 3 août, ainsi que Brenton Tarrant, l’auteur du massacre de Christchurch en Nouvelle-Zélande, qui a tué 51 personnes le 15 mars, ont tous deux justifié leurs actes par une référence à l’écologie.
¨      Tarrant est allé jusqu’à promouvoir un « écofascisme » dans son manifeste
¨      projet de faire disparaître l'espèce humaine de la Terre par une stérilisation généralisée.
Ø  la surpopulation croissante menant à une augmentation de l'exploitation des ressources de la planète et à une destruction inéluctable de la biosphère, une seule solution est envisageable selon ces écologistes : arrêter de nous reproduire.

v Positions écologiques du libéralisme
a        Vision des fondateurs du libéralisme
¨      Selon John Locke,  le droit de propriété ne comporte pas  celui d’épuiser les sols ou de transformer les forêts en déserts.
b        Compatibilité  écologie-libéralisme
      ¨      Pour le théoricien du libéralisme Bertrand de Jouvenel (on lui doit l’expression « écologie politique » ): « les champions de la libre entreprise seraient bien inspirés en exigeant de ces entreprises (polluantes) des mesures préventives contre les dommages, faute de quoi la nécessité de les réparer conduira inévitablement au développement des pouvoirs publics en ce domaine.»
c         Mise en cause de l'État
¨      Bertrand Lemennicier ironise : « C’est connu,le réchauffement serait la faute du marché. Ce dernier serait incapable de valoriser les effets externes positifs (les transports en commun) et ou négatifs (la pollution). Tous ces hommes politiques et ingénieurs, conseillers du Prince, qui ont construits des centrales nucléaires en grand nombre, et vont en construire d’autres, sans se soucier de l’avenir quand il faudra les fermer ou les recycler, ne sont pas d’affreux capitalistes, ce sont des hommes de l’État.»
d        Dénonciation libérale du danger de totalitarisme étatique
¨      Questions de Corine Pelluchon
Ø  Comment préserver les droits de l’homme, sa liberté, tout en établissant des limites à son action sur son environnement ?
¨      Drieu Godefridi : « Il y a chez les écologistes ce que Jean-François Revel nommait un désir de totalitarisme, qui se vit sur un mode différent selon que l’on est militant ou idéologue. Les électeurs et militants écologistes rêvent d’une société qui serait exempte des défauts qu’ils prêtent à la société actuelle ; s’il sentent confusément que cette société ne serait guère favorable à la liberté individuelle, ils sont prêts à en payer le prix. Très différent est le cas des idéologues écologistes, dont le désir totalitaire — de contrôle total et permanent de l’homme, dans chacune de ses activités, sur le modèle du panoptique de Bentham et Foucault — est pleinement assumé. Ceux-ci veulent le contrôle total sur leurs semblables... L’écologisme est un totalitarisme ? La belle affaire, vous répondent ces idéologues, “Nous n’avons plus le choix !" »

e        Défense libérale du capitalisme vert
¨      Il s'agit de réduire les émissions de CO² par les investissements et la recherche scientifique
Ø  Le capitalisme vert veut répondre au changement climatique et à l'effondrement de la biodiversité par toute la géo-ingénierie : par les OGM, les énergies propres, l'isolation…
¨      les tenants de «la croissance verte» estiment qu'un nouveau régime d'accumulation fondé sur des produits ou des énergies renouvelables est possible. Il suffirait de diffuser sur le marché des produits verts.
¨      Mais l'objection "Produire vert, c'est produire, donc user" paraît sans réponse de leur part"  Le seul exemple des métaux interroge : comment produire les cellules photovoltaïques, les turbines d’éoliennes, les moteurs électriques, les batteries alors que les gisements de cuivre, zinc, nickel... n'ont plus que quelques décennies devant eux
f        La finance peut-elle sauver le monde ? d'après l'article de Julie de la Brosse, Le Monde du 9 sept 2019
¨      Depuis quelques années, une nouvelle branche d’activité s’est développée : la finance dite « durable », regroupant, outre les fameux green bonds, l’ensemble des pratiques d’investissement prenant en compte des critères extra-financiers comme l’environnement ou le social. L’investissement socialement responsable (ISR) représenterait quelque 31 000 milliards de dollars en 2018, soit le quart de la gestion d’actifs aux Etats-Unis, et la moitié en Europe.
¨      La bascule a vraiment lieu en 2015, avec le discours du gouverneur de la Banque d’Angleterre, Mark Carney, sur la « tragédie des horizons », érigeant le risque climatique en danger systémique. Selon cet ancien banquier de Goldman Sachs, 20 000 milliards de dollars (chiffre réévalué depuis) de valeur boursière pourraient partir en fumée sous l’effet du réchauffement climatique. Cette allocution, qui sera suivie de mises en garde répétées du FMI et des banques centrales, a fait l’effet d’un tsunami. A partir de là, la plupart des grands de la gérance d’actifs se sont mis à faire de l’intégration ESG », explique Christian Gollier, de la Toulouse School of Economics.
¨       À ce stade, il est bien difficile de séparer le bon grain de l’ivraie. « Malgré de belles initiatives, il y a encore beaucoup de greenwashing et de socialwashing », estime Alexandre Poidatz d’Oxfam. Selon une étude de l’organisation américaine Majority Action, les plus gros gérants d’actifs de la planète – BlackRock, Vanguard et autres JP Morgan, tous signataires de PRI – continueraient non seulement à financer massivement les énergies fossiles, mais aussi à voter contre les résolutions climatiques présentées en assemblée générale. 

v Mouvements écologiques français devant l'alternative gauche/droite
¨      Dès le début des années 1970, Antoine Waechter estime que l'action écologiste doit dépasser le cadre des associations et se développer dans un véritable parti politique. C'est ainsi qu'il crée le mouvement Écologie et Survie en 1973.
¨      Face à Brice Lalonde qui préfère agir à travers des réseaux associatifs tels que Les Amis de la Terre, Waechter participe à la création du Mouvement d'écologie politique (MEP) puis participe à la création des Verts.
¨      Il refuse toutefois d'inscrire ce parti dans la séparation traditionnelle gauche/droite. Lorsque la majorité du parti des Verts décide néanmoins de s'assumer comme héritière des combats historiques de la gauche et de n'accepter d'alliances qu'avec elle, Antoine Waechter, mis en minorité, fait scission et crée un nouveau parti, le Mouvement écologiste indépendant (MEI).
b        Les Verts ont pu, ces dernières années, constater l'échec de l'inscription de l'écologie politique dans la gauche : "Ce positionnement ne leur a pas permis d'obtenir de résultats en participant aux gouvernements de F.Hollande, et EELV n'a jamais réussi à avoir des élus sans être à la remorque du PS", note Martine Billard
c         Yannick Jadot et EELV
¨      En se déclarant "favorable à la libre entreprise et l'économie de marché", la tête de liste écolo aux élections européennes 2019, Yannick Jadot,  détache EELV de son image de parti de la gauche radicale, à l'image du tournant centriste adopté par les Verts outre-Rhin.
¨      Certains militants EELV refusent cette ouverture au centre droit : elle trahit, selon eux, leur idéologie, qui se veut une alternative radicale au capitalisme et au libre-échange.

¨      Les membres d'EELV peinent à trouver comment agir une fois sortis des feux médiatiques électoraux. 
¨      Possible récente ouverture de EELV à gauche ? Au sein de EELV, certains (motion d'Alain Coulombel ) défendent la "construction d'un espace politique avec une partie de la gauche en voie d'écologisation".  Il s'agirait de Génération.s, Nouvelle Donne ou Place Publique. Autour de Philippe Stanisière, une part de EELV ferme la porte à une alliance avec la "gauche productiviste comme le PS ou le PCF".
¨      Le bon score aux élections européennes de 2019 ( 13,5%)
Ø  est toutefois très inférieur à celui de 2009 ( 16,3 %). Un excellent résultat non suivi à l'époque d'initiative ou de rôle politique notable.
Ø  Permet néanmoins à Yannick Jadot de déclarer en 2019 que « le temps de l’écologie est venu ».
¨      Face aux prises de position à portée mondiale du G7 de 2019 à Biarritz (Amazonie, taxation des GAFA…), EELV n’a rien pu dire si ce n’est engager le fer sur un autre terrain, celui de la défense d'un petit échassier dont le ministère de la transition écologique avait autorisé la chasse.
d        Par-delà leurs différences, E. Macron et Y. Jadot ont en commun de vouloir dépasser le clivage gauche-droite et de se disputer un électorat sociologiquement très proche. 

v Écologie sociale-démocrate
a        Selon l’historien Philippe Buton « L’écologie n’appartient pas au patrimoine idéologique de la gauche ». Pourtant, un pionnier du socialisme, Charles Fourier, formule dès les années 1820 l’idée que le capitalisme industriel ravage le globe, que la déforestation a un effet catastrophique sur les sols et le climat. D’où le projet de Fourier et de ses disciples d’une reforestation de la Terre. Les utopies fouriéristes prônent un rapport esthétique à la nature, une relation de soin et de valorisation, qui relève d’un «socialisme jardinier».
Illustration Christelle Enault
b        À partir des années 1970, le Parti socialiste s’ouvrit cependant à cette préoccupation écologiste : les expressions « cadre de vie » et « environnement » apparaissent dans les discours et les motions. Il reste que cette rencontre entre la gauche et l’écologie dans l’ère post-68 fut « tardive et heurtée », ce qui s’expliquerait par la puissance de la tradition marxiste en France.
c         En 1993, Dominique Voynet met A.Waechter en minorité au sein des Verts, ce qui aboutit à son départ et à l'inscription des Verts dans la gauche plurielle du gouvernement Jospin en 1997.
d        Une opposition de fond semble apparaître au sein du PS aujourd'hui : croître ou décroître? La "gauche dite de gouvernement" s'oppose aux idées souvent proches de la décroissance défendues par son allié de Place Publique Raphaël Glucksmann.
e        Une contradiction possible entre gauche démocratique et écologie :
¨      Alors que la droite est sensée mener une politique de l'offre, la gauche a toujours défendu une politique d'injection de fonds publics.
¨      Cette politique keynésienne caractérisant la gauche entraîne une augmentation de la consommation ou/et des investissements qui pourrait contredire de front la volonté d'épargner la terre. A moins que l'État ne soit assez convaincant pour orienter ces compléments dans une direction écologique.  
¨      La gauche sociale-démocrate réduit le thème de la croissance à la question de son partage sans la remettre elle-même en cause.
¨      Acheter = Consommer
Ø  Les revendications  syndicales d'augmentation globale du pouvoir d'achat contredisent certains discours civilisationnels de gauche qui remettent en cause la société de consommation.
f          Selon Arnaud Montebourg, la social-démocratie doit se reconstruire autour d'un recul de la mondialisation. Fidèle à sa défense des produits français (le maillot bleu à rayures), il pense que  le capitalisme serait mieux combattu en filtrant suffisamment les frontières. Cette vision rejoint certaines sensibilités nationalistes de droite, voire d'extrême-droite.
     g        La survalorisation marxiste du travail peine à être remise en question
           ¨      Bernard Maris l'a fait pourtant :  Dire "le travail crée de la valeur" après Smith, Ricardo, Marx  ne fait pas avancer le Schmilblick, car, hélas, il y a travail et travail ; les paysans qui détruisent les terres avec leurs insecticides ne sont pas des travailleurs, mais des parasites ; ils détruisent de la richesse, de la beauté, de l’utilité, Mais qui oserait dire qu’ils sont des parasites ? Personne. Qui dirait que les producteurs d’automobiles, ces braves travailleurs à la chaîne, sont des parasites, des destructeurs de paysages, des pollueurs, des fabricants de stress ? En quoi le "travail" du paysan beauceron serait-il moins néfaste que le travail du manœuvre à la chaîne ? Tout ça pour dire que cette survalorisation marxiste du travail me semble finalement… obsolète ? dangereuse ? indémontrable ?
h        Bernard Maris était un admirateur enthousiaste du Keynes optimiste sur l’avenir, prédisant l’abondance de culture et d’arts car le problème d’intendance aura été résolu. Ce même Bernard Maris était aussi d'un pessimisme noir qui ne voyait que deux issues au délabrement social et écologique du monde : la « grande catastrophe », ou bien la « termitière parfaitement auto-régulée »  c’est-à-dire la dictature. Alternative funeste en filigrane chez un certain nombre de penseurs écologistes, comme par exemple Hans Jonas qui plaçait ses espoirs dans une régulation écologique centralisée à la soviétique.
i          Aux élections européennes 2019, la liste socialiste-radicaux de gauche, malgré son intitulé "Envie d'Europe écologique et sociale" n'a obtenu que 6,2 % des voix


v Écologie dans le discours des  partis ou mouvements  d'extrême droite
a        L'écologie d’extrême droite est présente depuis la fin du XIXe siècle, notamment en Allemagne.
c         Discours extrêmistes sur les Allemands « peuple de la forêt » (Waldvolk), dont le caractère présenté comme «authentique » les différencierait des Anglais et des Français et de leurs créations artificielles en forme de parc.
d        L’écologie ne devient réellement un enjeu majeur de l’extrême droite occidentale non allemande qu’au début des années 2000. Durant longtemps, elle fut considérée dans ces milieux comme une idéologie de « gauchistes » ou de «hippies ». Les écologistes étaient parfois qualifiés du qualificatif de «pastèques », c’est-à-dire vert à l’extérieur et rouge à l’intérieur…
e        L’écologie est surtout pour l'extrême-droite une écologie des populations :
¨      les groupes ethniques sont perçus comme des entités essentialisées se partageant des territoires qui leur seraient propres, eux-mêmes issus des écosystèmes.
Ø  En ce sens, leur écologie est régie par une « mixophobie », un rejet de l’autre, de l’étranger qui doit rester dans son environnement naturel sans accès à une consommation à l'occidentale.
¨      Cela implique une politique anti-immigrationniste
Ø  les immigrés extra-européens devant retourner « chez eux » pour retrouver «leurs racines », voire, pour les plus racistes de ces ethnodifférentialistes, leur « environnement naturel ».
f          réduction de la population mondiale
¨      Savitri Devi. Ardente néonazie, également militante écologiste radicale, publie Impeachment of Man, qui fait la promotion du malthusianisme et de la réduction de la population mondiale.
g        Création d' Earth First! dans les années 80 aux USA. « No Compromise in Defense of Mother Earth! »
¨      Déclaration de Dave Foreman, un des fondateurs de Earth First!. À la question : «Que conviendrait-il de faire selon vous pour lutter contre la faim dans le monde ? », il répondit : « Le pire que l’on puisse faire en Éthiopie serait d’aider les indigents. Le mieux serait de laisser la nature trouver son propre équilibre, de laisser les gens là-bas mourir de faim. »
      h     Marion Maréchal Le Pen a bien compris comment récupérer les arguments de consommation locale, arguments parfois liés au sentiment cocardier national. Sa déclaration du 28/09/2019 : "C’est nous qui sommes légitimes pour porter ce combat [écologiste].[...]  Nous sommes les plus légitimes à proposer des modèles économiques alternatifs qui encouragent à produire et à consommer local : permaculture, biomimétisme, recyclage, système naturel de dépollution, création d’algo-plastique. [...]  Mais tout ceci ne peut fonctionner que dans une logique de consommation locale, fondée largement sur l’initiative entrepreneuriale, et dans le cadre, évidemment, de frontières protectrices."



v Réactions pro écologistes nationales
a        À la suite de la première marée noire qui a touché les côtes françaises (le naufrage du Torrey Canyon en mars 1967), création d’un ministère de l’Environnement en janvier 1971
b        Première manifestation antipollution, à vélo, en avril 1972
c         René Dumont
¨      premier candidat à s'être présenté sous l'étiquette écologiste à une élection présidentielle française, en 1974. C'est un auteur prolifique avec près de 70 ouvrages dont L'Afrique noire est mal partie en 1962 et L'Utopie ou la mort ! En avance sur son temps, bien connu pour son éternel pull-over rouge, Dumont surprend les Français en se montrant à la télévision avec une pomme et un verre d'eau, pour leur expliquer avec des mots tout simples combien ces ressources sont précieuses et en péril.
¨      Certains voient en René Dumont le père spirituel du parti des Verts
d        Principales manifestations anti-nucléaires
¨      avril 1971 : Première manifestation contre le nucléaire civil en France, marche sur Fessenheim
¨      juillet 1971 : au Bugey réunissant 15 000 à 20 000 personnes.
¨      Février 1975 : « Appel des 400 » scientifiques opposés au programme nucléaire  français. .
¨      mars 1975 : rassemblement de 15 000 personnes à Erdeven (Morbihan - France).
¨      1977 à Creys-Malville, dans l'Isère. Plus de 60 000 manifestants marchent sur le site : un mort et des dizaines de blessés du côté des contestataires.
¨      1981: abandon du projet de la centrale de Plogoff
¨      1985: l'affaire du Rainbow Warrior Ce soir-là, en Nouvelle-Zélande, le navire de Greenpeace, baptisé Rainbow Warrior, explose. Après des semaines de polémiques et d'enquêtes, Laurent Fabius finit par admettre que les services secrets français ont été commandités pour cette opération, destinée à empêcher Greenpeace de protester contre les essais nucléaires dans le Pacifique.
¨      2006 : manifestation à Cherbourg contre le projet de réacteur EPR à Flamanville (Manche - France), 30 000 personnes
¨      2007 : manifestations à Rennes, Lille, Toulouse, Lyon et Strasbourg anti Flamanville. 62 000 manifestants à travers toute la France
e        Actions de Nicolas Hulot
¨      Mise en œuvre d'une partie des mesures décidées par la COP 21
¨  Son départ médiatisé, dénonçant à la fois le manque d'agissement de son gouvernement et le faible soutien des Français à l'écologie.
¨      Sa démission précédera de peu le mouvement des gilets jaunes qui aboutira à la suppression des mesures écologistes de taxation des carburants décidées par la COP 21 et appliquées par lui lors de son ministère.
f          Modifications de comportements face à la menace écologique
¨      Généralisation de gestes tels que
Ø  Économie d'eau (bains/douches)
Ø  Tri des déchets
Ø  Extinction des lumières
Ø  Réduction de la consommation de viande (d'environ 1 % par an en France)
Ø  Développement des achats de produits bios, ou locaux
Ø  Interdiction des sacs de plastique
Ø  Davantage de déplacements en véhicules propres (vélo, trottinette…)
Ø  Initiatives mises en place pour réduire la place de la voiture en ville:
·         amélioration ou gratuité des transports encommun (comme à Dunkerque, Compiègne, Aubagne....ou Tallinn en Estonie)
·         péages urbains
·         incitations au covoiturage
Ø  les territoires fourmillent d’initiatives, comme en atteste chaque jour l'émission Carnet de campagne sur France Inter.
·         Un exemple parmi des centaines 
g        Des lycéens et étudiants français se rallient, toutefois en faible nombre,  aux «Fridays for Future», ces manifestations qui rassemblent chaque semaine des jeunes aux quatre coins du monde.
h        D'octobre 2019 à janvier 2020, une convention citoyenne formée de 150 individus tirés au sort représentant la diversité de la population française doit se pencher sur les mesures à prendre pour lutter contre le dérèglement climatique. Leurs propositions seront soumises « sans filtre » au vote du Parlement, à référendum ou traduites en mesures réglementaires.
 Les « 150 » devront plancher sur cinq thèmes : se déplacer, se loger, se nourrir, consommer, produire et travailler, et aborderont la question de la taxe carbone. Ils seront libres d’auditionner les experts de leur choix. 
i        Développement  des ressourceries

  ¨      Quatre fonctions
Ø  la collecte de dons ou de déchets
Ø  la valorisation à travers le contrôle, le nettoyage, et la réparation
Ø  la vente à faible prix
Ø  la sensibilisation à l’environnement
  ¨      Trois grands principes:
Ø  La protection de l’environnement par la prévention, le détournement et la valorisation de déchets potentiels
Ø  Le développement d’une Économie sociale et solidaire
Ø  La création de liens et la mise en place d’un service de proximité pour la prévention des déchets.

j        Le Président Macron propose d'inscrire dans l'article 1 de la Constitution : la République française « agit pour la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et contre les changements climatiques ». 

v Les réactions pro écologistes mondiales
¨      Les représentants de la protection de la nature ont depuis des décennies déjà, poursuivi l’internationalisation de ce domaine politique : l’orientation vers des conceptions comme la biodiversité, la mise en réseau des habitats, etc, rendant tout à fait inadaptée la pertinence des espaces nationaux.
b        Les conférences internationales ont débuté avec le sommet « Une seule Terre », organisé par les Nations Unies à Stockholm en 1972; le Programme des Nations Unies pour l’environnement a été créé cette même année.
c     Vingt ans plus tard, en 1992, après plusieurs catastrophes écologiques qui ont manifestement contribué à éveiller les consciences, la conférence de Rio de Janeiro a rassemblé  178 pays.
d        Le protocole de Kyoto, élaboré en 1997, sur les changements climatiques (en particulier sur les émissions de gaz à effet de serre) a été ratifié par de nombreux pays, même si des exceptions notables (les Etats-Unis) en ont affaibli la portée symbolique et pratique.
e        Accord de Paris sur le climat (COP 21) : premier accord considéré comme universel traitant du changement climatique et proposant des mesures pour ralentir ce phénomène.
f          Retrait des Etats-Unis de l’accord de la COP 21
¨      L’annonce a fait beaucoup de bruit : le président Donald Trump a annoncé le 1er Juin 2017 le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris. L’explication donnée par le président américain est que les mesures prévues par le texte seraient néfastes pour l’économie de son pays.
g         Luttes contre les pollutions, comme par exemple :
¨      en Californie, où Arnold Schwarzenegger développe avec succès une politique environnementale ambitieuse
¨      en Chine, où les autorités ont ordonné la fermeture de milliers d'usines trop proches des villes et où elles ont décrété fin 2017 la fin du chauffage au charbon. La pollution atmosphérique reste encore importante, mais a baissé de 32 % en 4 ans selon l'étude de l'Institut de politique énergétique de l'université de Chicago.
¨      en Argentine où les militants écologistes parviennent à ce que leur action prenne une tournure judiciaire efficace contre de multiples et graves pollutions  comme la présence de résidus toxiques à l'air libre dans de gigantesques piscines dans la région de Neuquen, comme celle du fleuve Matenza-Riachuelo où quelques 5 000 industries déversent leurs déchets entre Buenos Aires et le Rio de la Plata).
¨      Plusieurs villes européennes parviennent à réduire la présence des voitures. Par exemple, Oslo leur interdit son centre-ville. Cela s'accompagne par des investissements massifs sur les transports en commun, leur gratuité, et la multiplication des pistes cyclables.
h        Après l'initiative française lors du G7 2019 :
¨      dénonciation de l'attitude du président brésilien Bolsonaro à propos de  la forêt amazonienne.
¨      Remise en cause du Mercosur, le traité de libre-échange négocié par la Commission européenne sortante.

      i        C’est un logo devenu viral sur les réseaux sociaux : un sablier à l’intérieur du cercle de la Terre, peint en noir. Le 7 octobre 2019, des drapeaux verts, bleus ou jaunes arborant cet emblème flottaient dans les rues de Sydney à New York en passant par Londres ou Paris. Les militants écologistes d’Extinction Rebellion ont entamé une « rébellion internationale » – une ou deux semaines d’actions coups de poing à travers le monde – pour dénoncer l’inaction « criminelle » des gouvernements face à la crise climatique. Né en Grande-Bretagne en octobre 2018, Extinction Rebellion (XR) se présente comme un “mouvement mondial de désobéissance civile en lutte contre l’effondrement écologique et le réchauffement climatique”, désormais installé dans 56 pays. Sur son site internet français, XR indique que la non-violence est l’un des dix principes auxquels doivent adhérer ses membres



v Résistances aux politiques pour la préservation de la planète
a        La formation des élites françaises et les critères des décisions publiques ne prennent en compte les préoccupations écologiques que de manière sectorielle ou secondaire. L’écologie est encore perçue comme une contrainte et non une opportunité.
b   Les pneumologues, les cardiologues, les cancérologues constatent des effets de la pollution. Mais  ces effets et les autres impacts sur la nature ne sont souvent pas directement observables par de nombreux individus. Seules des études scientifiques les rapportent. Même si l'ensemble de la population ne remet pas en cause l'exactitude de ces expertises, la prise de conscience reste théorique, sans le ressenti  immédiat que permettrait l'observation directe de dégâts. Les efforts écologiques consentis peuvent ainsi en pâtir.
c         Face à certaines actions politiques écologiques, des groupes économiques ou sociaux défendent leur intérêt propre à court terme
¨      Le modèle agricole polluant reste difficile à remplacer à court terme pour les agriculteurs qui y sont engagés
Ø  techniquement
Ø  financièrement
Ø  chimiquement (par quoi remplacer le glyphosate ?)
¨      « France, veux-tu encore de tes paysans ? » C’est derrière ce slogan que qu'une journée d'action (8 oct 2019) avec blocages de routes est organisée par   la FNSEA)  et  les Jeunes agriculteurs (JA) , notamment contre le projet du gouvernement d’étendre les zones de non-traitement par pesticides autour des habitations.
¨   Diverses industries résistent aux recommandations écologiques, jouant sur les arguments souvent exacts de la perte de performance au sein du marché international et de l'impact sur l'emploi.
Ø  tromperie des firmes automobiles concernant les polluants émis par leurs véhicules
Ø  refus de la taxation du kérosène de la part des compagnies aériennes et de leurs employés
Ø  mêmes attitudes de la part des pétroliers, des chimistes, des routiers, d'EDF résistant à l'éolien... etc (82 % des entreprises du CAC 40 français ne mettent en oeuvre aucune stratégie de neutralité carbone, selon l'étude du cabinet Ecoact en 2019)
¨      Si le malaise et certaines revendications du mouvement des gilets jaunes sont sans doute compréhensibles, la suppression obtenue de la taxe carbone sur les carburants prévue par la COP21 révèle les limites aux privations consenties que requiert l’écologie.
d        Pour moins user la planète, il faudrait restreindre la consommation (et donc le pouvoir d’achat), réduire les déplacements en avion et en voiture, augmenter la taxe carbone sur les carburants et l’énergie.
¨      Pourtant, tout cela est aux antipodes des aspirations  pécuniaires de bien des citoyens, qui demandent d'un gouvernement l’augmentation du pouvoir d’achat.
¨      Tant que les électeurs voteront davantage selon ces critères économiques,  les décideurs politiques craignant de ne pas être réélus se conformeront à leurs attentes.
e        Aux élections de mi-mandat aux États-Unis
¨       la plupart des votes sur les questions écologiques ont été refusés par les électeurs.
¨       mettant en cause les seules "élites" et affranchissant dans une « common decency » les classes populaires de responsabilités dans les dégâts écologiques.
¨      "C'est tout le problème de l'émancipation dans une société où les dominants et les dominés partagent un même imaginaire et des valeurs similaires".
g        Les Bons, les Méchants et tous les autres
¨      Une petite minorité, souvent militante, adopte un mode de vie très économe pour la planète
¨      Une autre minorité adopte un discours souvent agressif contre les "écolos" et affiche une sorte de fierté d'enfumer sans vergogne au volant de gros véhicules.
Ø   Illustration de ce phénomène à l’aide de posts Facebook 
¨       La grande majorité des individus  
Ø  adopte les petits gestes (surtout s’ils permettent de faire des économies rapidement ou s’il y a un bénéfice santé à la clé)
Ø  mais, bien qu'informée, ne consent encore que peu d'efforts étendus. Exemples :
      ·         sans coercition policière, nombre de voitures  continuent à circuler lors des journées parisiennes "sans voiture"
      ·         fort développement des voyages en avion
·         utilisation très gourmande en énergie des communications informatiques (mails, sms, streaming...) . Selon https://www.consoglobe.com/ : chaque requête sur Internet correspond à 7 g. de CO2 émis, donc 15 requêtes à 1 km parcouru en voiture. 
Chaque envoi de mail provoque l'émission de 20 g d'équivalent CO2. Les seuls mails d'une entreprise de 100 personnes génèrent chaque année l'équivalent de 13 allers-retours Paris-New York.
      ·         utilisation devenue courante des machines à café à capsules
·         faible reprise de l'information selon laquelle rouler à 80 km/h au lieu de 90 permet de gagner environ 12 % de carburant, de réduire d'autant l'empreinte carbone des trajets.
   ·         invasion de la mode des lourds SUV (plus du tiers des voitures neuves vendues en France sont des SUV)
   ·         développement du confort de la climatisation, très gourmande en énergie (voitures, bureaux, commerces et domiciles)
   ·         volumineux achats de glyphosate sur des sites étrangers pour les jardins particuliers   (contournement  de l'interdiction française)
¨      L’écologie est/serait restrictive, trouble-fête : le plaisir associé à la consommation de certains produits ou services tels que  smartphone, voiture, vêtements, voyages... est mis à mal dans les discours écologiques
¨      L’écologie est/serait complexe :  certains discours écologiques citant des mesures techniques ou des labels hermétiques sont ainsi rejetés.
¨      L’écologie prétexte ou mensongère utilisée par certaines entreprises : en pratiquant le greenwashing, elles dépensent plus dans leur communication, jusqu’au changement de leur identité visuelle (logo et couleurs) que dans la réparation des dégâts écologiques inhérents à leurs activités.
¨      L’écologie ambivalente : les arguments promouvant des comportements écologiques sont généralement contradictoires avec ceux qui incitent à la consommation. Les individus étant face à des injonctions opposées ont donc plus de difficultés à être favorables aux discours écologiques : on demande aux gens d’acheter un maximum et on leur dit "c’est pas bien, cela pollue"
¨      L’écologie culpabilisatrice : certains consommateurs s’indignent de la stigmatisation de leurs « mauvais » comportements et de la culpabilisation à outrance. Pour eux, les discours écologiques surestiment leur rôle : « on cherche à culpabiliser l’individu, c’est comme si on disait "si tu fais pas ça, t’iras pas au paradis mais en enfer".
¨      L’écologie responsabilisante : alors que les discours incitent les individus à adopter des gestes écologiques, ceux-ci estiment que la responsabilité devrait incomber d'abord aux autres parties prenantes, notamment aux entreprises et à l'État.
¨      L’écologie décourageante : la gravité et l'étendue des dégradations en cours  mènent à la résignation : face au nombre de problèmes graves à résoudre, chaque jour apportant son lot, l'impression est d'avoir face à soi un obstacle insurmontable pour l'humanité.
¨      L’écologie rabat-joie : en revenant sur les graves et préoccupants problèmes, l'écologie s'oppose à l'idéologie du bonheur obligatoire, cette happycratie qui désigne l'injonction sociale et morale de rechercher à tout prix le bonheur personnel et la réalisation de soi dans toutes les sphères de sa vie.  
¨      « Apocalyptisme » diffus  : l’idée s'étend selon laquelle le cours des événements suit une marche inéluctable et échappe à la volonté humaine
(selon OpinionWay  en mars 2019, 48 % des Français pensent qu’il est déjà trop tard), d’où
Ø  le détachement de certains à l’égard des discours écologiques.
Ø   la préparation de certains autres à une vie nouvelle au cas où : un plan B pour la fin du monde
·         Et si tout s’écroulait vraiment ? Comment envisager le repas du lendemain ? Comment se déplacer, se chauffer, s’éclairer ? C’est en famille, ou entre amis, qu’on évoque ces questions sur un ton pas si ironique...


v Les préoccupations écologiques croissantes, des dernières décennies jusqu'à aujourd'hui
       Les préoccupations d'ordre écologiques se développent à partir de faits de plus en plus débattus :
¨      l'homme mis en danger dans son habitat (publications alarmantes du GIEC)
¨      Même si cela n'affecte encore qu'une minorité d'individus, il semble qu'il y ait de plus en plus de catastrophes naturelles liées au réchauffement climatique. Que l’on parle de la croissance du nombre d'incendies de forêt liés au réchauffement climatique, des cyclones et autres phénomènes… (dans le monde il y a 2 fois plus de catastrophes naturelles aujourd’hui qu’en 2002)
¨      Etudes chiffrant le nombre de décès prématurés provoqués par pollution de l'atmosphère (800.000 personnes par an en Europe)
¨      Dans le monde, les pollutions causent trois fois plus de morts que le sida, la tuberculose et le paludisme réunis. (et quinze fois plus que ceux causés par les guerres et toutes les autres formes de violence).
¨      En France, les 48 000 morts par an dus à la seule pollution aérienne sont à comparer aux 100 000 morts en moyenne annuelle pendant la seconde guerre mondiale. La moitié…
¨      La collapsologie, cet ensemble de théories visant à analyser, comprendre et anticiper les risques d’effondrement des sociétés, a fait beaucoup  parler d’elle. Des figures comme Pablo Servigne (Comment tout peut s’effondrer, 2015) ou Aurélien Barrau, parlant ouvertement d’effondrement, ont fait le buzz. Diffusion du livre de Julien Wosnitza (Pourquoi tout va s’effondrer, 2018)
¨       Deux des dix études scientifiques les plus consultées par le public en 2018 portent sur la biodiversité et sa disparition.
¨      Évidence de la contradiction quantitative entre explosion démographique,  augmentation de la consommation mondiale (en particulier asiatique) et espace limité.

v Capitalisme et Décroissance
a        La  croissance économique se retrouve de plus en plus mise en cause : la décroissance
¨      axiome de base : « On ne peut plus croître dans un monde fini »
¨      Le mouvement de la décroissance émerge le 1er mars 1972, quand est publié le « rapport Meadows » intitulé Les Limites à la croissance, juste avant la première Conférence des Nations unies sur l'environnement, à Stockholm. On parle alors de croissance zéro.
¨      Ivan Illich met en cause dès les années 70 l'efficacité de la société industrialisée.
Ø  Il invente le concept de "monopole radical : "Quand une industrie s'arroge le droit de satisfaire, seule, un besoin élémentaire, jusque-là l'objet d'une réponse individuelle, elle produit un tel monopole"
Ø  Il  critique le système automobile qu'il juge aliénant et illusoire. Il développe la notion de « vitesse généralisée », calculée en prenant en compte non seulement le temps passé à conduire une automobile, mais aussi le temps moyen passé à travailler pour l'acquérir et faire face aux frais afférents, la vitesse du bolide était bien moindre que celle d'un cycliste.
Ø  Il généralise cette idée de vitesse illusoire à la notion de contre-productivité : lorsqu'elles atteignent un seuil critique (et sont en situation de monopole), les grandes institutions de nos sociétés modernes industrielles s'érigent parfois sans le savoir en obstacles à leur propre fonctionnement
¨      Depuis, nombre d'essais, de publications, revues, associations, pratiques… défendent la notion de décroissance.
¨      Les "décroissants" invitent à réviser les indicateurs économiques de richesse, en premier lieu le PIB
¨      Les décroissants se démarquent du concept de « développement durable », consacré en 1987, et qui constitue selon eux un oxymore, voire une imposture. Voir plus haut dans cet article l'exemple de la pénurie prochaine des métaux indispensables aux produits verts.
¨      Serge Latouche  affirme que l'« on pourrait paradoxalement présenter la décroissance comme un projet radicalement marxiste. Que le marxisme (et peut-être Marx lui-même) aurait trahi. La croissance n’est, en effet, que le nom ‘vulgaire’ de ce que Marx a analysé comme accumulation illimitée de capital, source de toutes les impasses et injustices du capitalisme »
¨      Les décroissants préconisent un certain nombre de mesures, qui sont d'ors et déjà souvent reprises par une part importante la population :

  Ø  La recommandation de modes de vie plus simple (moyens de locomotion non polluants)
  Ø  La relocalisation économique, pour réduire les transports de marchandises, donc l'empreinte écologique
  Ø  La mise en place de systèmes d'énergie renouvelable ;
https://www.economie-magazine.com/dossier-34-decroissance.html
  Ø      Mais la consommation de produits locaux n'économise de l'énergie qu'à condition de ne pas utiliser de voiture (Transporter 10 kg de marchandises émet environ 1500g de CO2 que ce soit sur 15 km en voiture, sur 1600 km en camion ou sur 10 000 km en porte-conteneurs...)
¨      La ressourcerie : vecteur de décroissance
Ø  Réparer un lave-vaisselle, acheter un vêtement usagé, récupérer une lampe délaissée... Cela évite en effet d'user la planète en produisant à neuf de tels objets. Mais cela prive de revenu les ouvriers, employés, industriels ou investisseurs mobilisés par ces activités. Ressourcer, c'est bien décroître.
Ø Ces pertes de pouvoir d'achat pourraient être compensées par une consommation moins coûteuse.
b         Contradictions entre capitalisme mondialisé et écologie
¨      Le capitalisme se définit par la propriété privée des moyens de production. Dans ce système, l’initiative de la production revient aux acteurs privés, individus comme entreprises, guidés par la recherche d'un profit rapide directement lié à la quantité produite.
Ø  Or l'intensification des flux de marchandises est une des principales sources d'émissions de gaz à effet de serre
Ø  Comment serait-il possible de respecter une feuille de route écologiquement exigeante tout en signant des traités de libre-échange permettant de générer ce profit ?
¨      Pourtant le capitalisme sait très bien gérer la rareté, celle-ci en est même un des moteurs puisqu’elle nourrit les perspectives de profit.
¨      Même si la nature peut être considérée comme un capital, Dans la décision des capitalistes, seuls comptent leurs intérêts propres et non ceux du " Capital ".
¨      Le problème est celui du moyen terme et du long terme.
Ø  Il y a des dégâts écologiques graves mais suffisamment lointains pour  que la recherche du profit immédiat ne les prennent pas en compte.
Ø  Le franchissement de certaines frontières écologiques (telle que 2° de réchauffement en 2050) provoquerait des effets en cascades mettant en danger les populations humaines, compromettant la reproduction même de la vie, attentant au sens de la justice et de la dignité, toutes choses qui sont étrangères au capital et à sa logique de rendement immédiat.
Ø  Selon l’économiste Michel Aglietta : « Faire de la croissance soutenable nécessite de revoir toutes les règles de l’économie de marché, mais cela ne peut se faire sans politiques publiques de long terme, sans un prix du carbone élevé et sans rénover la force motrice de la finance que représente l’investissement public. » Un nouveau monde régulé, où le publicet le privé pourraient travailler ensemble pour réaligner l’intérêt desactionnaires et le bien commun, voici à quoi pourrait ressembler la finance responsable du XXIe siècle. On en est encore loin.
¨      Dans la perspective d'un dépassement du capitalisme, Pierre Madelin envisage deux possibilités :
Ø  Une sortie par le haut, mise en place par l'état au terme d'un processus électoral (ou révolutionnaire, mais la conjoncture ne l'est pas). Cela lui semble peu probable.
Ø  Une sortie par le bas brisant la dépendance du marché par des pratiques écologiques délocalisées assez répandues. Cependant P. Madelin ne nourrit aucune illusion quant aux vertus du peuple "qui a intégré les injonctions productivistes et consuméristes du capitalisme, et qui participe donc pleinement d'un modèle civilisationnel écocide".
c        Le slogan : Nous n'avons qu'une planète  qui sous-entend une limite physique à la croissance,  prend de l'ampleur
¨      À l'origine, Nous n'avons qu'une Terre est le nom d'un rapport sur l'environnement commandé par les Nations unies. Il est publié en 1972
¨      Déclaration d'Obama en 2015 : "Nous n'avons qu'une planète, il n'y a pas de plan B"
¨      Le slogan est depuis largement diffusé et repris. La recherche "Only one earth" sur Google mène à plus d'un milliard de pages

d        Selon l’astrophysicien Aurélien Barrau : «Les initiatives locales et la volonté citoyenne ne suffisent plus. Il est aujourd’hui vital que des décisions politiques drastiques - et contraignantes donc impopulaires - soient prises». La question est donc de savoir si les citoyens du monde accepteront, voire demanderont, que soient prises de telles mesures. Si non, la démocratie pourrait se montrer  contradictoire avec l'écologie.

e  À propos des incendies de la forêt amazonienne, remise en cause de la notion de territorialité
                   ¨      La plupart sont des feux volontaires, déclenchés par des agriculteurs pour gagner des surfaces cultivables, appliquant la volonté gouvernementale de poursuivre l'exploitation de la région
                        ¨       
Un pays peut-il être maître de son territoire s'il l'utilise en mettant en cause la santé du monde ?  L'idée d'une remise en cause de la notion de territorialité apparaît à la fois dans les milieux politiques, médiatiques, associatifs.   Faut-il une intervention onusienne ? Une mise sous tutelle ?

               ¨      Il s'agit de l'aboutissement de la notion d'"homme citoyen du monde".
           ¨      Assistera-t-on à une nouvelle Internationale sous des arguments écologistes ?



v    Qui pour traiter les problèmes écologiques ?


  • Le capitalisme est guidé par la recherche d'un profit rapide directement lié à la quantité produite. Comment pourrait-il traiter les problèmes écologiques ?
  • La gauche keynésienne vise à  permettre une progression des revenus, donc un accroissement d'une consommation qui, non orientée,  maltraiterait la question écologique.
  • Ceux qui, à droite ou à gauche, prônent une sortie (violente ou pas, démocrate ou non) du capitalisme n'ont pas encore de proposition crédible d'une société nouvelle non tribale.
  • La population mondiale reste ou devient attachée à un mode de vie dispendieux, peu décroissant,  rudoyant la planète.
  • Les dirigeants des démocraties, désirant être réélus,  n'appliqueront de politique écologique rigoureuse que dans la mesure où la majorité la souhaite et la soutient.
La prise de conscience de l'acuité et de l'urgence du problème ne pourra que modifier les positions bloquées décrites ci-dessus. Le collectif devra reprendre le pas sur l'individuel. À moins de ne pas croire en l'Homme, il faut l'espérer...