Onglets

lundi 24 septembre 2018

Expo "Caravage à Rome, amis et ennemis"


Du 21 septembre au 28 janvier 2019 au musée Jacquemart-André à Paris.

Né en 1571, Michelangelo Merisi, dit Caravaggio, va révolutionner la peinture italienne du XVIIe siècle. Dix de ses chefs-d'œuvre sont réunis ici.
Le Jeune St Jean-Baptiste au bélier (1602), Capitole, Rome
Sont aussi exposées de nombreuses toiles de ses concurrents, et sont évoqués ses soutiens et ses rivaux dans la Rome artistique de l'époque.

Pourquoi ce goût du clair-obscur ?

Sans vouloir "romantiser" le peintre, en faire un être maudit, un révolté dont l'image plait à notre époque ( Source ), Caravage – les rapports de police le prouvent – avait le sang chaud, la dague facile, jusqu'au crime de sang. Peu de doute que ses longs et fréquents séjours dans les sombres cachots ont fortement influencé sa vision du monde. Se retrouvent ainsi dans ses tableaux des vues restreintes, au fond ténébreux, dont les personnages sont à peine éclairés. En prison, il côtoie les marginaux, les prostituées, les vagabonds, et ce sont eux qu'il choisira comme modèles... Fini les sujets au profil grec, les joueurs de luth bouclés à la peau lactescente.
Joueur de Luth (1595) Musée de l’Ermitage (St-Pétersbourg) 
Ce sont des personnages d'apparence vulgaire qui apparaissent sur les toiles. Caravage peint alors les scènes même religieuses de manière très novatrice, avec un style jugé blasphématoire et vulgaire par nombre de ses commanditaires.
Judith décapitant Holopherne (1598) Galerie d'art ancien, Rome.


Le chiaroscuro

L'éclairage provient d'une source unique, diffuse, vive, difficilement identifiable. Il est parfois franchement latéral, souvent latéral de trois quart haut.
La mort de la Vierge (1605-1606) au Louvre
Analyse de l'oeuvre par Bernard M. Collet
Cela fait bien penser à un puits de lumière éclairant un cachot et concourt sans modération au façonné des corps. Quant au fond, il est souvent obscur, mal identifiable. La perspective est absente. Cela rend la scène particulièrement intimiste tout en produisant une ambiance dans laquelle les sujets sont porteurs "d'une destinée ombrageuse aux accents souvent pessimistes" (Source)
Madeleine en extase , Rome, collection privée.
Article sur les différentes versions du tableau

Ce traitement des toiles en clair-obscur, chiaroscuro, bouscule les codes formels maniéristes de l'époque. Il se présente comme l'exacte transposition de la vie dissolue de l'artiste, ombre et lumière.

mardi 18 septembre 2018

Comment choisir un film ?

À moins d'apprécier les salles obscures au point d'y supporter l'ennui ou la répulsion, il vaut mieux se renseigner un peu avant de s'enfermer avec tel ou tel long métrage.

Mais le choix est-il si simple ? Quelle méthode mettre en œuvre ?
Faisons un petit inventaire :


- Se fier à la distribution peut être périlleux : Mathilde Seigner et Claude Brasseur se sont plantés dans Camping 2
Christophe Lambert a campé un fâcheux Vercingétorix, Alain Delon et Arielle Dombasle ne pouvaient réussir à sauver Le jour et la Nuit. Les trois films cités figurent au top 20 des pires navets cités par Sens Critique.


- Se référer au seul metteur en scène est hasardeux : même des grands comme Buñuel ou Hitchcock ont reconnu avoir tourné des séries B infréquentables. Godard a pu nous endormir. Clint Eastwood a commis en 2018 un terne voyage touristique avec 15H17 pour Paris. Quant à Claude Lelouch, il peut passer du film culte comme Un homme et une femme à de l'insipide genre À nous deux


 - Écouter l'avis des critiques professionnels pourrait être moins risqué. Mais en y mettant quelques conditions limitatives. Il faut en effet prendre garde aux avis souvent très positifs sur les films français à large diffusion. Collusion d'intérêt ? Sans doute pas. Peut-être de sincères amitiés dans le milieu du cinéma. Probablement le souci louable de défendre un cinéma plutôt en perte de vitesse. C'est ainsi qu'on retrouve des notes élevées pour des films qui ne marqueront pas l'histoire. Par exemple le sympathique Première

jeudi 13 septembre 2018

Mademoiselle de Joncquières, le film

Des liaisons ennuyeuses

Qu'aime-t-on en général dans les films en costumes ? Certes les magnifiques accoutrements, mais aussi et surtout les dialogues ciselés par la langue du XVIIIème, le contexte historique, la trame fine et élaborée comme dans les romans de l'époque. Hélas, rien de cela dans ce film. Lointaine transposition de Diderot, les échanges verbaux sont verbeux, plats ("Un bonheur qui ne dure pas, c'est du plaisir" "Nos sentiments sont aussi pleins de tendresse que de raison"…) et aussi extrêmement répétitifs. Le cadre historique se réduit à des décors rebattus, à des robes trop proprettes, et il nous présente un libertinage simplifié, ignorant sa dimension révolutionnaire de libre-pensée et de négation religieuse, niant même par la pruderie extrême des images que les libertins sont aussi des jouisseurs. Au moment suprême d'un rapprochement des amants sur le canapé, la caméra se détourne sagement sur un livre qu'une main dépose sur un autre ! Aucune sensualité donc dans ce film bien amidonné. Quant à l'intrigue, elle ne devient intéressante qu'à la toute fin, après qu'une heure ennuyeuse s'est passée sans que presque rien ne se passe.


Un téléfilm ? 

Mais le plus terne est dans la réalisation. L'image ne traduit ni les sentiments ni les situations. Quelles que soient les circonstances, même lorsqu'elles se voudraient dramatiques, la mise en scène se borne à quelques tableaux : les promenades dans les

samedi 1 septembre 2018

The Guilty, le fim

Le septième art a plus d'un tour dans son sac

 

La bande-annonce VO
Sur l'écran de "The Guilty", un seul acteur visible, dans une seule pièce, parlant une heure et demi au téléphone, et nous voilà pourtant scotchés à notre fauteuil, pris dans le suspense, palpitant d'anxiété, saisis par la performance cinématographique. 

Certes, on savait que l'observance des trois unités – lieu, temps et action – est une des bases de l'art dramatique. Mais au cinéma, qui est allé aussi loin dans un respect aussi strict ? C'était le rêve d'Hitchcock de tourner un thriller sans sortir d'une cabine téléphonique, Möller l'a réalisé.

Quelles sont donc les sources de tant de tension ?

Au fur et à mesure du déroulement du huis clos, la sidération vient et les questions se posent : qui est ce cinéaste danois, Gustav Möller, qui a osé un tel pari ? Pour un premier long métrage ! Comment parvenir à cette force avec si peu de variété d'images ? Quelles sont donc les sources de tant de tension ? Une bande son magistrale ? L'intensité du scénario et ses rebondissements, certains retentissants ? L'opposition flagrante entre une composition dramatique complexe et ce minimalisme des images ? La mise en place