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samedi 9 juillet 2016

Truman

Allons-nous tous pleurer dans nos fauteuils ?

En général, histoire de ne pas titiller mes angoisses personnelles, j’évite soigneusement les films mettant en scène les individus malades et leur fatal destin. Là, imprudent, je ne m’étais pas informé sur le scénario de « Truman ». Dès les premières images, la petite toux de Julian (Ricardo Darin) et le voyage Canada- Madrid de son ami Tomas (Javier Càmara) pour une exceptionnelle visite m’ont vite fait comprendre que je n’allais pas sortir serin. Et que peut bien nous dire un tel film ? Que le cancer est terrible et que nous sommes tous mortels ? Thème périlleux ! Est-ce que nous allions tous pleurer longtemps dans nos fauteuils ? À la fois sur la
triste fin du pauvre héros et sur le mélo facile du pitch ?

La pudeur du désespoir

Rien de cela. Parce que tact, finesse des échanges, humour, dignité accompagnent avec justesse tout le film. Entre les deux amis, la détresse sait se comporter et jouer d‘elle-même. Pas de déballages empesés, aucun surplus de pathos. Les bonnes manières de l’amitié fréquentent un humour acéré et sont comme une pudeur et une politesse du désespoir. J’ai plus entendu rire dans la salle que renifler des larmes. La narration est sans doute linéaire, enchaînant avec presque trop de soin les séquences successives. Mais loin de desservir le sujet, cette construction trace la ligne inexorablement droite vers la fin, souligne le trait de l’inflexible sale temps qui veille, celui des quatre jours que Tomas a prévu de rester. Aux scènes les moins faciles succèdent les plus légères , évitant ainsi une atmosphère étouffante. Le trouble avance en compagnie du sourire dans le même cheminement. Tout mélo est ainsi savamment esquivé. Pour parvenir à une telle justesse de ton, pour faire passer une telle intelligence des échanges, il fallait des acteurs hors pair. Le duo est excellent, et c’est un ravissement de les voir évoluer et incarner une si belle amitié.

Truman joue bien

Truman aussi joue bien. Truman, c’est le nom du chien, celui de Julian. Mais plus qu’un chien auquel Julian s’accroche, Truman est un symbole : à la fois celui de l’existence qui ne laisse au final pas grand-chose ­–juste un brave animal–, et celui d’une vie si pleine de chaleur simple, d’amour, de sensibilité. Sur un sujet délicat, « Truman » s’avère tendrement tonique.