À la Fondation Calouste Gulbenkian, à Paris, s'est achevée (déc. 2018) une exposition réunissant des œuvres d'Alberto Giacometti et du sculpteur portugais Rui Chafes.
Chafes est contemporain, né en 1966 à Lisbonne, année de la mort de Giacometti.
Chafes est contemporain, né en 1966 à Lisbonne, année de la mort de Giacometti.
Gris, vide, cris
C'était l'intitulé de l'expo, trois mots tirés d’un vers de Giacometti. Étonnante rencontre entre les œuvres de ces deux artistes que l’espace, le temps et la forme même de leurs sculptures a priori séparent.
Des œuvres conçues spécialement pour l'expo
Mais plus encore qu'une rencontre, qui impliquerait des analogies formelles ou un esprit de filiation, il s'agit d'une connexion, d'une soudure d'une œuvre à l'autre. Il est ici question d'une active recherche de résonance menée par Rui Chafes envers son aîné. Parce qu'en effet, fait rarissime, Rui Chafes a conçu et forgé six sculptures spécialement pour le projet.
C'est la commissaire de l'exposition, Helena de Freitas, qui a tout mis sur pied et ainsi permis à Rui Chafes de "transporter sa flamme", dans tous les sens du terme, dans l'intimité de Giacometti.
Les mots
Dans le catalogue de l'expo, est publié un glossaire d'une vingtaine de mots. Ce vocabulaire a été choisi par Helena de Freitas dans les écrits des sculpteurs pour exprimer et élucider leur démarche.
Le vide, la nuit, l'ascension et la chute, la verticalité, la solitude, le masque, la transcendance…
Toutes les formes et les thèmes exposés dans les œuvres.
Ce glossaire est présenté ci-dessous dans des tableaux successifs, avec de courts extraits de déclarations de Rui Chafes à diverses occasions, et une traduction libre en langue française.
Oser s’aventurer à l'intérieur d'une sculpture
Le visiteur hésite… Peut-il pénétrer dans ce couloir à l'obscurité totale ? A l'intérieur de cette grande oeuvre de Chafes ? Encouragé par un gardien, il ose avancer, seul. La marche est totalement aveugle. Pour s'assurer, il pose une main sur une paroi de cet étrange couloir, sent qu'elle est en métal, un fer lisse et plat, et il comprend que tout a été couvert d'une peinture noire mate. En frappant du doigt comme à une porte, la paroi répond d'un son métallique… Ce vide donne une impression de mort. Quelques pas plus loin, de petits ronds de lumière l'attirent, ainsi que d'étroits rectangles, des meurtrières à peine éclairées, comme des blessures. Approchant l'œil, le visiteur découvre des œuvres de Giacometti enchâssées dans l'imposant montage de Chafes. Minuscules sculptures, objets fragiles, ainsi mis en valeur à l'intérieur de sa grande installation. « Des œuvres à la limite de l’existence ». Le visiteur esseulé, ainsi cloîtré par la nuit et le silence, peut concentrer sur elles son regard, sa pensée, toute son émotion.